jeudi, avril 25, 2024
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Algérie: Bensalah nommé président par intérim, malgré l’opposition de la rue

Une semaine après la démission d’Abdelaziz Bouteflika, le Parlement algérien a nommé mardi, comme prévu par la constitution, Abdelkader Bensalah président par intérim, malgré le rejet par la rue de ce pur produit du régime.

Les Algériens qui continuent de manifester en masse pour réclamer le départ du « système » avaient clairement affiché leur refus de voir le président du Conseil de la nation (chambre haute du Parlement), âgé de 77 ans, prendre l’intérim.

Mardi, à la mi-journée, des milliers de d’étudiants descendus dans la rue à Alger scandaient toujours « Dégage Bensalah! » et « Système dégage », devant la Grande poste, en centre-ville.

Après plus d’un mois d’une contestation massive et inédite à travers ce pays d’Afrique du Nord, M. Bouteflika a dû démissionner le 2 avril sous la pression conjuguée de la rue et de l’armée, qui a menacé de ne plus reconnaître son autorité.

Agé de 82 ans, affaibli par un accident vasculaire cérébral depuis 2013, M. Bouteflika était chef de l’Etat depuis 20 ans. Mais son souhait de briguer un 5e mandat lors de la présidentielle prévue en avril a provoqué de gigantesques manifestations, notamment à Alger, malgré l’interdiction des rassemblements depuis 2001.

Mardi, les parlementaires de l’Assemblée populaire nationale (APN, chambre basse) et du Conseil de la Nation ont acté mardi la « vacance » à la tête de l’Etat et confirmé le choix de M. Bensalah pour assurer l’intérim, pendant 90 jours.

« Grande responsabilité » –

Durant cette période, une élection présidentielle, à laquelle M. Bensalah ne pourra être candidat, doit être organisée.

« Je vais travailler à concrétiser les intérêts du peuple », a promis Abdelkader Bensalah devant le Parlement. « C’est une grande responsabilité que m’impose la Constitution », a ajouté cet homme qui a occupé les fonctions de député, ambassadeur, haut fonctionnaire ministériel, sénateur, et a présidé les deux chambres du Parlement.

Il a accédé à la présidence du Conseil de la nation trois ans à peine après l’arrivée d’Abdelaziz Bouteflika au pouvoir.

Les partis d’opposition, se basant sur les revendications de la rue, avaient boycotté la réunion du Parlement, refusant de valider la nomination de M. Bensalah.

Vendredi dernier, jour traditionnel des manifestations, les Algériens avaient de nouveau défilé en masse pour exiger que soient exclus du processus de transition les hommes-clés de l’appareil mis en place par M. Bouteflika.

Outre M. Bensalah, deux autres responsables sont visés: le président du Conseil constitutionnel Tayeb Belaïz et le Premier ministre Noureddine Bedoui.

Même le quotidien gouvernemental El Moudjahid, traditionnel vecteur de messages du pouvoir, avait suggéré mardi d’écarter Abdelkader Bensalah de la présidence par intérim.

« Cette personnalité (…) n’est pas tolérée par le mouvement citoyen, qui exige son départ immédiat, mais aussi par l’opposition et une partie des représentants des formations politiques de la majorité des deux Chambres du Parlement », avait écrit El Moudjahid.

Mais le chef d’état-major de l’armée, le général Ahmed Gaïd Salah, de facto le nouvel homme fort du pays, exige que la succession de M. Bouteflika se fasse dans le strict respect de la Constitution.

« C’est là où il y a un vrai problème. L’armée tient à ce que cela (la transition) se fasse à l’intérieur de la Constitution et la rue veut que cela se fasse à l’extérieur de la Constitution. Si l’armée n’assouplit pas sa position, on va vers la rupture », a dit à l’AFP Rachid Grim, enseignant en Sciences politiques à l’Institut supérieur de gestion et de planification (ISGP) d’Alger.

Le mouvement de contestation réclame de sortir de ce cadre pour mettre sur pied des institutions de transition permettant d’engager des réformes profondes et d’organiser des élections libres.

« Première étape » –

El Moudjahid a évoqué une piste de compromis avec la création d' »une commission indépendante » qui serait chargée de tout le processus électoral.

Interrogé mardi matin avant la réunion du Parlement, Mourad, un entrepreneur de 50 ans, a dit vouloir la démission de M. Bensalah. « C’est la voix du peuple et le peuple doit avoir raison », a déclaré ce père de famille qui va manifester le vendredi avec ses deux filles, âgées de six et neuf ans.

« Elles ne savent pas ce qu’est la démocratie (…). Je veux leur inculquer ce qu’est la liberté », ajoute-t-il.

Dans un communiqué, Human Rights Watch a estimé mardi que le départ de Bouteflika était « tout au plus une première étape pour mettre fin au régime autocratique ».

« Lors de toute phase de transition, les autorités devraient pleinement respecter les droits qu’ont les Algériens de s’exprimer librement, de se réunir et de s’associer », a ajouté l’ONG.

« Elles devraient, le plus tôt possible, envisager d’amender les dispositions du code pénal et les lois relatives aux associations et au rassemblement qui restreignent l’exercice de ces droits », a jugé HRW.

afp

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